Edito par Thierry Baë    « L’essence du style Yang » 
Ce style n’est pas à séparer du style Yang, il en est simplement l’essence.
Lisez les 10 principes de la famille Yang, si souvent cités dans les ouvrages traitant du Taiji de style Yang, et vous aurez la définition du style du  serpent !  L’enseignement de l’école de Robert Boyd vous révélera le comment…
Mes 30 années de pratique m’ont fait « voyager » dans le monde du Taiji, tous styles confondus.
Les styles Yang suivent très approximativement ces principes, la répartition du poids par exemple, le plus souvent à 70/30%, ce qui ne définit pas le plein du vide. Le relâchement de la poitrine « fondre la poitrine et étirer le dos » est ignoré, voire nié,  « mauvaise traduction » dit-on… Les jambes et les bras sont « travaillés » en muscles, alors qu’un serpent n’ayant pas de membres, c’est leur inactivité qui est à rechercher…
Observez les anciens, le corps, les postures, il n’y a rien de « formel », le principe guide la forme…
La forme du serpent pour la première fois, m’a révélé, incarné, ce qu’est le Qi.
L’essence de cet art martial transforme vos perceptions physiques, facilite la circulation de l’énergie dans votre corps, diminue les douleurs articulaires et redonne mobilité. L’ancrage à la terre recentre votre position au monde, pour être plus serein, plus disponible.
Chacun, à son niveau et selon ses attentes, peut découvrir une transformation réelle du corps, plus de vitalité, d’enthousiasme.
Transformation pour une pratique accessible à tous…

Taiji quan, le style du Serpent de la famille Yang
Ip Tai Tak (1929 – 2004) débuta sa carrière d’artiste martial à l’école primaire où il étudia le kung-fu et le judo. A 21 ans il découvrit le Taiji quan avec Maître Dong Yīngjié qui était un élève de Yang Chengfu et de Yang Shaohou. Il étudia avec lui pendant 4 années et il devint son assistant. Après avoir admiré une démonstration de Yang Shou Zhong au sabre, il devint élève puis premier disciple de ce dernier pendant près de 30 ans.
Son statut de premier disciple et le fait que son maître n’ait pas d’héritier masculin, lui ont permis d’acquérir l’apprentissage de la forme du Serpent du style Yang. La pratique que lui présenta alors Yang Shou Zhong différait de ce qu’il avait appris jusqu’alors. Il accédait à l’essence de la pratique familiale. Cette forme comprenait en plus de la forme Yang enseignée vers l’extérieur, des qi gong spécifiques, une forme rapide et une poussée des mains beaucoup plus martiale qu’il pratiqua pendant 24 années avec son maître.
Son fils n’ayant pas souhaité pas faire carrière dans la pratique du Taiji quan, Ip Tai Tak prit alors la décision de former deux disciples hors de sa famille : John Ding, qui instruit à Londres et Robert (Bob) Boyd dont l’école est à Burlington (Vermont) aux États-Unis.
Robert Boyd a un parcours martial qui débute dans les années 60 à Burlington, dans une salle d’entrainement qu’il occupe encore aujourd’hui. Il commença par un art martial externe, le Karaté, qu’il pratiqua pendant plus de 17 ans. Ensuite, il bascula vers les arts internes et le Taiji quan en particulier avec John Conroy qui était un élève de Chu Gin Soon, le deuxième disciple de Yang Shou Zhong. Il devint enseignant en Taiji quan de la forme Yang dans sa forme diffusée pour tous, le style du Tigre créé par Yang Chengfu, et la pratiqua de 1984 à 2000.
Sa rencontre avec Ip Tai Tak à Hong Kong en 2000, fût une révélation car les principes qui ont accompagné toutes ses formations en Taiji quan sont alors devenus limpides. Il dut pour cela faire le vide de ses formations antérieures, oublier un style, celui du tigre, qui développe sa puissance à partir des jambes, pour laisser venir un style dont le coeur se situe dans la colonne vertébrale, le style du serpent.                                                                   JP.G

Pour en savoir plus :  Interview du Grand Maitre Ip Tai tak par Robert Boyd
                                      Les 10 principes de la famille Yang
                                     Interview de Robert Boyd parue dans la revue SAMOURAÏ
                                      Article paru dans la revue CAPILAL SANTE Juillet 2014

Formation au  Tai ji quan de la famille Yang

Le style du serpent demande l’apprentissage de principes essentiels spécifiques, même pour des pratiquants confirmés dans un autre style Yang de Taiji

Débutant :
Forme à mains nues et premiers principes
Comme dans toute école, les premiers pas consistent à apprendre les mouvements et postures qui constituent la forme codifiée de la famille Yang.
Dans ce cadre, la qualité basique de ces postures reposera sur un état de corps dont la première qualité sera le relâchement.
Attention, il ne s’agit pas simplement de détente, toute personne tendue peut apprendre à se détendre à l’aide d’une technique somatique. Il s’agit, dans l’action, de relâcher les membres et les muscles qui empêchent de maintenir, voire de créer notre relation au sol :  de la poitrine,  des épaules, des kuas (région de l’aine) et des chevilles.
Ces 4 premiers points sont la base de notre relation au sol et nous permettront d’aborder les spécificités de la famille Yang
– Postures : le poids, durant le déroulement de la forme, passe à 100% d’ une jambe à l’autre
– Dépasser l’axe central
L’apprentissage de la forme se complète avec des pratiques à deux : poussée des mains et les applications de base

Médians 1 :
Connaître la forme entière et étudier plus spécifiquement les premiers principes
– Placer les épaules et relâcher les coudes
– Définir et expérimenter « creuser la poitrine ». Creuser n’est pas pousser vers l’arrière pour ouvrir le dos, mais creuser, fondre dans le sol, d’où le nécessaire relâchement des kuas et chevilles
– Premiers pas dans la forme au sabre
– Poussées des mains (suite), Da lü et premiers San shou (forme à deux codifiées)
– Première partie de Ding bu quan, la forme en postures mobiles, qui développe l’essence du travail interne propre à la famille Yang
– 14 Qi gong en mouvement pour la colonne vertébrale

Médians 2 :
Approfondissement des principes
– Creuser la poitrine et étirer le dos : creuser la poitrine en relation avec le sol permet d’étirer le dos et de développer l’énergie de la «corde» qui crée la puissance interne : le Qi adhère dans le dos
– Relâcher la taille : en relâchant la taille, on veille à ouvrir le sacrum et l’espace des reins
– Associer les 3 principes : placer les épaules, creuser la poitrine/étirer le dos, relâcher la taille
– Formes au sabre et à l’épée, en accord avec le style du serpent
– Suite du Ding bu quan (2ème partie)

Avancés :
Maîtrise des principes dans la forme lente
– Formes à la lance et au bâton
– Pratique avancée des poussées des mains et applications, San shou (4 enchaînements)
– Qi gong posturaux et en mouvements associés au style du serpent
– Suite du Ding bu quan (3ème partie)

Pour un pratiquant engagé, pratiquant quotidiennement, peuvent s’ajouter en cours privés, la forme rapide et certains Qi gong

 

Tai ji quan

Le style caché de la famille Yang

 

Les origines du Taiji quan de la famille Yang remontent au XIXème siècle. Époque où Yang Fuku que l’on nommait Yang Luchan (1799 – 1872) a diffusé un style de boxe utilisant la structure interne du corps plutôt que la force externe physique. Cette boxe portait initialement les noms de boxe de la souplesse (Ruan Quan) ou boxe des transformations (Hua Quan).
Yang Luchan s’est initialement formé aux boxes de style Chen auprès de Chen Changxing (1771–1853) dans le village de Chenjiagou au nord de la province du Henan. Plusieurs versions content son apprentissage avec le grand Maître du style Chen. Après cet enseignement, il n’y a plus de traces de lui jusqu’à ce qu’il devienne instructeur d’arts martiaux à la cour des Mandchous sous la dynastie des Qing (1644-1912). C’est pendant cette période qu’il matura son style de boxe, le Taiji quan de la famille Yang. En garnison, plusieurs princes mandarins dont ceux de la famille Wu le sollicitaient régulièrement. Il avait pour surnom Yang Wudí «Yang l’invincible». Il forma ainsi de nombreux soldats au sein des bataillons d’élites de l’armée impériale chinoise et en particulier les troupes du Shenji Yíng (Le bataillon du mécanisme divin) en charge de la protection de l’empereur.

Yang Luchan eut trois fils : Yang Fenghou – Yang Banhou – Yang Jianhou
Yang Banhou (1837–1892) fut d’abord formé par un élève de son père, Wu Yuxiang (1812–1880) fondateur du style Wu/Hao, puis par son père, Yang Luchan, dans le style qui allait devenir celui de la famille Yang. Il devint lui aussi un instructeur des gardes du corps de l’empereur dans le bataillon du Shenji Yíng. Il forma en particulier Wu Quanyou (1834–1902) officier de la garde impériale dont le fils Wu Jianquan devint le fondateur du style Wu.
Yang Jianhou (1839–1917) refusa l’entrainement extrêmement dur que lui imposait son père et ne fit pas cette carrière militaire. Il devint néanmoins un très grand maître de Taiji quan de la famille Yang. Grâce à sa gentillesse, il eut de nombreux disciples dont deux de ses fils, Yang Shaohou et Yang Chengfu.
Yang Shaohou (1862-1930) était un maitre de Taijiquan qui reçut pendant plus de 25 années, l’enseignement très rude de son oncle Yang Banhou. Jusqu’à ses dix ans, il a aussi profité de celle du grand père Yang Luchan et bien sur de son père Yang Jianhou. Il était réputé pour la rudesse de son enseignement, et il eut peu de disciple de ce fait. Il pratiquait une forme très rapide de Taiji quan, optimisée pour le combat rapproché. Il participa à la rédaction des premiers manuels de Taiji quan modernes (avec photos) avec son frère au début du XXème siècle.
Yang Chengfu (1883-1936) quant à lui, fut un grand réformateur du Taiji quan et la plupart des formes modernes de Taiji quan de la famille Yang ont sa paternité. Il reçu l’enseignement de son père, de son oncle Yang Banhou, mais surtout de son frère qui était de 21 ans son aîné. Entre 1914 et 1928, au sein de l’institut de recherche en culture physique de Pékin, dans un grand élan de remise en forme physique de la population chinoise, il a également créé une forme simplifiée et moins martiale, plus à même d’être pratiquée par tout un chacun. Il fut aidé en cela par son frère Yang Shaohou, par Wu Jianquan et Sun Lutang, le fondateur du style Sun. Cette forme simplifiée se diffusa de par le monde sous l’appellation Taiji quan de la famille Yang.
Il eut de très nombreux élèves, et parmi eux ses fils, Yang Zhen Ming d’un premier mariage qui fût son premier disciple, puis Yang Zhen Jí, Yang Zhen Duo, Yang Zhen Guo lors d’une deuxième noce. Les trois plus jeunes Yang Zhen Jí (1921- ), Yang Zhen Duo (1926- ) et Yang Zhen Guo (1928- ) sont toujours aujourd’hui en Chine. Yang Zhen Duo est celui qui est porteur de la tradition familiale dans le monde entier au départ de la Chine. Cependant, il n’a pu profiter des cours de son père que pendant quelques années car son père mourut vers ses dix ans et il fut formé par son demi-frère Yang Zhen Ming qui était le seul des quatre a avoir reçu l’enseignement complet de sa famille. Le petit fils de Yang Zhen Duo, Yang Jun (1968- ) représente aujourd’hui la 5ème génération de maître en Taiji quan dans la lignée de la famille Yang.
Yang Zhen Ming (1910 – 1985) le plus vieux des quatre fils de Yang Chengfu, appelé aussi Yang Shou Zhong est celui qui fut le porteur de la tradition Yang, formé par ses parents conformément à la tradition chinoise. Il put ainsi profiter des compétences de son grand-père Yang Jianhou jusqu’à ses 7 ans et de son oncle Yang Shaohou jusqu’à 20 ans, son père Yang Chengfu jusqu’à 26 ans.
La tradition chinoise veut que le premier disciple soit le fils ainé de la famille, comme l’avait été son oncle Yang Shaohou. Yang Shou Zhong suivit cet enseignement particulier. A 14 ans il était déjà l’assistant de son père Yang Chengfu et à 19 ans il était maitre en Taiji quan et formateur des officiels du gouvernement chinois. Il forma aussi ses demi-frères à la disparition de son père.
Yang Shou Zhong quitta la Chine en 1949 pour Hong-Kong. Il vécut à Yuen Long dans les nouveaux territoires. Il travaillait dans une usine de feux d’artifices tout en donnant des cours de Taiji quan à quelques élèves. Il perdit sa première femme et son fils pendant la guerre. Par la suite, il eut trois filles d’un deuxième mariage, Yang Di (Amy), Yang Mali (Mary) et Yang Yili (Agnès) qui reçurent une partie de son enseignement.
En 1954, Ip Tai Tak devint son élève et en 1958, son premier disciple. Le rang d’un fils ! Ip Tai Tak aida Yang Shou Zhong à s’installer à Hong Kong afin d’y enseigner le Taiji quan. Il resta à ses côtés dans son école durant plus de 30 ans.
Yang Shou Zhong eut deux autres disciples, Chu Gin Soon en 1977 qui créa une école aux États-Unis et Chu King Hung en 1983 qui créa une école en Europe. Yang Shou Zhong décéda en 1985.

JP.G

yang_luchanYang Luchan

portrait YCF
Yang Chengfu

Chen Weiming et son maitre Yang Chenfu

La video de Yang Shou Zhong faisant la forme

IP-142Ip tai Tak

 

 




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